Biographie
Prénoms : Bernard ou Bernarde ou Claude selon le sens du ressac
Habitat naturel : canapé, lit
Habitat obligé : bureau, cuisine, voiture
Je suis Bernard limite et je n’aime pas prendre des risques.
Pourtant chaque fois que je quitte mon lit, je prends des risques. Il faut respirer hors de ma flaque sans faire exploser mes branchies avec l’air vicié des obligations. Il faut prend soin de se lever de la patte gauche. C’est important pour bien commencer la journée. Puis chaque fois que je pose une patte dans un de mes cinq chaussons, je prends le risque d’enfiler le mauvais. Patte gauche, chausson jaune. Patte gauche +, chausson indigo. Patte gauche ++, chausson sable chaud. Patte gauche +++, chausson orange fluo. Patte gauche ++++, chausson gris pluie. Patte gauche +++++, chausson coquille d’huitre #1515.
A cette étape de ma biographie, vous pouvez déjà comprendre de la complexité des risques que je prends tous les matins : je ne dois pas me tromper sur le nombre de + de mes pattes. Je pourrais leur donner un prénom, mais comment être sûr qu’il plaira aux pattes ? Je n’ai aucune patte droite pour des raisons aussi bien politiques que pratique puisque je confonds la droite et la gauche. A moins que ce soit la gauche qui vire à droite. Bref, chaque fois qu’on me demande le sens de la vie, je dois prendre le risque d’indiquer la mauvaise gauche plurielle.
Tous les matins, après avoir enfin quitté ma couette, je dois enfiler à toute vitesse une coquille au risque de me dessécher. J’en ai plusieurs dans le tiroir. Certaines sont à ma taille et d’autres sont trop petites. Je ne dois pas me tromper au risque de m’étouffer. Si je mets une de mes vies d’avant, je risque de me noyer dans les tâches ménagères ou de suivre les pas d’un homme ou de me taire pour ne pas entendre hurler ma mère.
Alors, non, je ne dois pas me tromper de coquilles. Aujourd’hui, je choisis de sortir la noire à bande blanche et d’y assortir mes tatouages. Demain, quand je devrais conduire l’habitacle de ma voiture, il me faudra la coquille à bord rond bordée d’écoute et d’empathie. Après-demain, quand je devrais conduire habitacle de la cuisine, j’endosserai une coquille d’inox sur laquelle les tâches rebondissent. Le surlendemain, quand je devrais piloter un bureau de 33 tonnes, je me glisserais dans une coquille-cravate bleue.
Aujourd’hui, je voudrais prendre le risque de dépasser l’introduction de mes textes mais je saute à la conclusion.
Je suis Bernarde sans limites et je n’aime pas prendre des risques. Je veux rester dans mon lit sur le canapé. Alors, aujourd’hui, je sors de ma coquille pour tenter de parler à de magnifiques inconnu.e.s. puis je refuse leur 06 et leur snap. J’ai eu peur de risquer le risque de devoir envoyer un message. Quelle patte utiliser ?